Chapitre 1
7 septembre 2013
Date : ©2014, Décembre
Principe : -
Réflexion et inspiration : -
Longueur du texte : 6558
Nombre de mots : 1152
5h00.
Samedi.
Le journal paraît. Alioth est au pied de la boîte aux lettres. Il est au comble du trac : son encart va-t-il paraître, quelle impression va-t-il faire ? Comment les lecteurs le jugeront-ils ?
Pour calmer son appréhension, il fredonne une chanson.
— « 5 heures du mat' j'ai des frissons… »
Il regarde sa montre.
— Nous sommes Samedi, cela va laisser le temps aux lecteurs de se décider. S'ils me répondent, ils enverront leur lettre lundi. Dès mardi, j'aurais des réponses. Mercredi aussi. Jeudi dernier délai. Je saurais si j'en ai suffisamment ou si j'en ai trop !
Il lève les yeux au ciel.
— Protégez-moi du trop !
Enfin ! Le porteur de journaux arrive, il tend la main pour recevoir son journal…
Le porteur de journaux, refuse de lui donner le journal.
Il l'engouffre dans la boîte aux lettres ! Stupeur ! Comment ose-t-il cet… abruti !
— On m'la d'jà fait, si c'est bien votre boîte, vous avez la clé ! assène le porteur de nouvelles.
Alioth est interloqué, il n'avait pas prévu ça. Il court vers la maison, décroche les clés, fonce vers la boîte, prend le journal, retourne à la maison… Il ferme la porte.
Appuyé contre le mur de l'entrée, son cœur bât la chamade, l'inquiétude l'étreint. Puis, l'image de quelqu'un lui fauchant son journal, justement aujourd'hui, lui traverse l'esprit. Il remercie cet employé dévoué qui protège sa précieuse lecture du matin. Alioth philosophe.
— Toute chose a une profondeur et une résonance insoupçonnées.
Alioth contemple religieusement le journal, va à son bureau. Le chat intrigué de cette humeur "très" matinale, le suit à bonne distance. Il l'observe, cherchant à détecter cette nouveauté dans ses habitudes si… habituelles, voire rituelles.
Alioth feuillette religieusement les pages : elle est là (voir fig. 2).
En bonne place ! Elle saute aux yeux.
Alioth décrypte son ressenti
— Si j'étais un lambda : je la trouverai sérieuse, je lui ferais peut-être confiance.
Une autre relecture.
— Assez pour répondre ? Difficile à dire. Mais c'est court, rien d'ostentatoire, pas prétentieux, pas aguicheur, pas arnaqueur.
Alioth semble satisfait et rassuré.
— Allez ! Le sort en est jeté. Le destin fera le reste.
Ce qui compte aussi, c'est qu'il n'a pas rêvé. Rien d'autre que le sommeil du juste. L'angoisse qui l'a étreint la veille s'est envolée. Ne reste que le désir d'une nouvelle aventure à découvrir, bribe par bribe, étape par étape.
Alioth n'a pas envie d'aller se recoucher. Il a une montée d'adrénaline propice à l'action.
— P'tit déj, un peu d'exercice, un peu d'écriture et je téléphonerai à Varm. Va falloir m'occuper pendant trois jours pour ne pas devenir fou à tourner en rond. Le mieux est de préparer cette séance.
Alioth se dirige vers le couloir. Le chat lui fonce entre les jambes et s'arrête devant la pièce qui est dédiée à ces séances. Il miaule, ronronne, se met debout sur ses pattes et fait ses griffes sur le bois.
Alioth s'arrête au milieu du couloir, surpris… un peu fier aussi de l'osmose qu'il y a entre eux. Ou alors…
— Il sait déjà ?
A-t-il tout compris avec son instinct de chat ? Alioth s'adresse à Salomon :
— Ca t'intéresse, mon gars ?
— Sang de chat noir, de sorcière, ne saurait mentir… dit-il en plaisantant, sur un ton incantatoire.
Depuis la salle, la voix de Bavard retentit.
— Au boulooot ! Au boulooot ! Et moooiii, bande de saligoooooo !
Alioth déverrouille la porte, entre, ouvre les persiennes, laisse les fenêtres béantes pour aérer cette pièce. Il nettoie le perchoir de Bavard, met des graines, de l'eau et va le chercher pour qu'il arrête de vociférer son envie d'être en leur compagnie. Il l'installe. Bavard sautille et bat des ailes.
— Chat noaaaarrr… Baazaaaaard…
Salomon, tout en se nettoyant, le regarde et l'ignore tel un seigneur.
La pièce surprend de prime abord : elle est octogonale, la moquette y est vert bronze avec un pentacle blanc : une étoile à cinq branches entourée d'un cercle, figure de protection bien connue. Au centre, trône une table qui elle n'est pas ronde, ni ovale, mais longue aux extrémités en demi-cercle. Alioth défait le drap blanc qui la recouvrait pour l'épousseter à l'une des deux fenêtres. La table doit être ronde dans sa forme initiale, des rallonges, quatre au total, ont été insérées en son ventre. Pratique pour s'adapter au nombre de personnes présentes. Le bois de cette table est verni, le plateau également, il n'y a pratiquement pas d'interstice entre chaque élément. (voir en annexe la disposition de cette pièce).
A l'extérieur du cercle, dans l'alignement de la table, deux meubles hauts. Certainement pour contenir tout ce qui est utile à l'exercice du spiritisme dans cette pièce. Sur quatre autres côtés, des photographies encadrées : Allan Kardec (Sud-Ouest), Victor-Hugo (Nord-Ouest), Théophile Gautier (Nord-Est) et Arthur Conan Doyle (Sud-Est). Allan Kardec était le maître du spiritisme et les autres en ont été de fervents adeptes. Au-dessus de chaque tableau, deux bougeoirs à douze emplacements chacun.
Il sort du meuble côté Ouest, deux coupelles, du sel et une bouteille d'eau. Ensuite les bougies, nombreuses. Il commence à les placer en montant sur un escabeau. Les chaises ne sont pas dans cette pièce, Alioth les apportera plus tard, au nombre qui sera nécessaire.
Son corps lui rappelle le côté terrestre : il a faim. Alioth regarde sa montre.
— Déjà 13 heures. Il me manque les huiles essentielles et l'encens. Je déjeune et ensuite mes petites emplettes.
Alioth s'apprête à sortir.
— Salomon, en cuisine ! Bavard acceptes-tu mon bras ?
Tout en battant des ailes, Bavard grimpe sur le bras tendu d'Alioth.
— Gymmmmmaaaastique ! Biiiiibiiiii !
14h00.
Il n'y a pas de magasin dédié au spiritisme sur Le Havre. Habituellement, Alioth va à Paris pour cette thématique. Pour l'encens, il se rend dans la boutique Ethno-Shop, rue de Paris près du Volcan. Il n'y trouvera pas d'encens de purification, mais s'il trouve de la myrrhe, du romarin et du camphre, cela devrait faire l'affaire. Pour les huiles essentielles, il lui faut : lotus, lavande, bois de santal, lilas, romarin. Sinon, un petit tour en pharmacie devrait lui permettre de compléter ce qui lui manque. Et au pire, il commandera sur internet. Le colis arrivera forcément à temps. La séance ne se fera pas avant une semaine. Alioth commente lui-même ses achats.
— …et ne pas oublier de la cire liquide d'abeille, de l'huile d'amande douce. Après tout ça, je rentre… Un bain, un livre et je serais fin près pour le déjeuner de demain.